Because you know sometimes words have two meanings. And sometimes all of our thoughts are misgiven.

Peu de gens s'aventuraient dans les marécages. Ils avaient peur que quelque chose vienne les croquer pendant leur contemplation de l'eau stagnante et des étranges plantes qui peuplaient cet endroit. Ils n'avaient pas forcément tord, d'ailleurs. J'avais remarqué que pour aller visiter cet endroit, il fallait attendre que le soleil soit à son zénith, et partir bien avant le crépuscule. Et venir armé. Sinon, les probabilités de rencontrer des bestioles dangereuses et mortelles explosaient. Ce n'était pas pour autant que je n'aimais pas cet endroit. Bien au contraire. Il y avait dans cet endroit une odeur entêtante de fleurs qui me rappelaient celle de notre jardin en France. Pourtant, c'était incompréhensible que je puisse avoir des sentiments envers cet endroit. Il avait été le dernier endroit où j'avais été heureuse, celui qui avait complétement scellé mon enfance, l'endroit qui avait scellé la fin de son bonheur pour sept années. Sept longues années. Non, en fait je ne préférais même pas y penser. J'avais passé ça, et il y avait peu de chance que Miss Parfaite Psychopathe, a.k.a ma sœur ne s'aventure de le royaume sombre qu'est la mort. Alors, autant arrêter immédiatement de me torturer en pensant à cette saloperie.

J'étais enfin dans un monde où elle ne pourrait pas m'atteindre avec ses mots et ses manigances. C'était à la fois le seul endroit où elle ne pourrait pas avoir accès et le plus beau des trésors à mes yeux. Tout était si étrange, mais en même temps si beau, si sensé dans un sens. Oui. Pourtant les rares personnes que j'avais pu rencontré avaient semblé haïr ce monde, le trouver effrayant et déprimant. Certains étaient fous, d'autres étaient tellement terrifiés qu'ils étaient encore plus dangereux que les pires créatures de la forêt. Je n'aimais pas éviter les gens, j'aimais bien la solitude, mais je ne pouvais pas rester tout le temps avec moi-même. Je me connaissais assez pour savoir que je finirais par devenir aussi fou que les autres. Le seul problème était que les gens ne voulaient pas rester les uns avec les autres. Ils avaient trop peurs pour ne serait-ce que tenter de s'accorder leur confiance les uns aux autres. Pourtant, j'avais bien compris que c'était ce refus qui en plongeait plus d'un dans la folie. Il suffirait de les rassembler, qu'ils luttent ensemble contre ce monde. Et tout serait alors possible. il faudrait que quelqu'un d'assez doux, de patient et de généreux les aident à surmonter leur peur des autres, et ils seraient libérés.

Mais bon, ça n'arriverait pas tout de suite. J'avais beau le savoir, ça ne m'empêchait pas pour autant d'y rêver. Je m'éloignais du bord du ponton du marais. Le contempler ne m'apportais rien quand j'y restais trop longtemps. Il était beau seulement en petite quantité. Et puis, à force de parcourir le monde, je finirais surement par trouver quelqu'un qui partagerait le même point de vue que moi. C'est en me retournant que j’aperçus une silhouette humaine se faufiler hors du couvert des arbres. Elle s’avançait. Elle ne titubait pas. Elle ne tremblait pas. Elle n'agrippait pas convulsivement son arme. Peut-être que j'avais enfin une chance de parler à quelqu'un de réfléchi en fait. « Bonjour » ai-je fais tout sourire. Maman me l'avait dit, personne ne résiste aux gens qui sourient. Je me suis avancée, sans réagir aux grincements inquiétants sous mes pieds. Réflexion faite, j'aurais peut-être du. « Ravie de vous … oh meeeerde» Oui. Autant vous dire tout de suite que si ma mère m'avait entendu faire une telle présentation, elle m'aurait passé le savon de ma vie. Mais elle n'était pas là. Et j'avais une bonne excuse. Un coup elle était bien là, solidement rattachée au reste du pont, et un autre et cette putain de planche n'était plus là. Or, ce n'était pas dans mes plans de tomber dans les marais du Pays des Merveilles, ça ne m'était jamais arrivé, et je n'avais vraiment pas envie que ça commence aujourd'hui. C'est pour cette raison que j'ai eu le réflexe de m'accrocher à l'inconnu qui sortait de l'ombre. M'agrippant à lui comme une sangsue, peut-être même que je l'étouffai à moitié. Et en fait, en sentant mon poids m'entraîner vers le sol, emportant cet inconnu en même temps. Je me susi rendu compte que finalement je l'avais étranglé à moitié pour rien. Mince.

En plein dans la tourbière, le seul endroit des marécages qui étaient profond, et où on pouvait rester coincer suffisamment longtemps pour essayer de faire ami-ami avec les monstres. Et voilà que je me retrouvais là-dedans, enfoncée jusqu'aux genoux, m'enfonçant encore évidemment. Et avec un étranger qui n'avait rien demandé à personne le pauvre. Peut-être que c'était pour ça que les gens évitaient d'aborder des inconnus comme elle. « Et merde. Pardon. Vraiment» s'excuser était la seule chose qui me restait à faire en attendant de trouver une solution.

Il ne suffit pas de dire: Je me suis trompé; il faut dire comment on s'est trompé.

Est-ce qu'un jour, quelqu'un prendrait la peine, une bonne fois pour toute, de m'expliquer pourquoi ce genre de merde n'arrivait qu'à moi ? Je n'étais pourtant pas du genre maladroite, c'était à croire que les malheurs me poursuivaient parfois. Aide toi, le ciel t'aidera disait le dicton. Et bien, j'avais beau faire tous les efforts du monde pour que ça ne m'arrive pas, malheureusement, ça n'y faisait rien. Mais le plus triste dans tout ça, c'est que cette horreur ne me poursuivait pas depuis toujours, au contraire, ça n'arrivait que depuis que je m'étais débarrassée de la présence pesante de ma sœur, comme quoi, même dans son absence, cette saleté de vipère m'empêchait encore de profiter de ma vie - enfin, de ma mort … N'allait-elle donc jamais me laisser en paix ? C'était étouffant, limite infernal à ce stade là. Mais se prélasser dans la boue avait quand même un côté amusant. « Garde tes excuses pour toi tu veux bien...si les excuses suffisaient en ce bas monde, la police ne servirait à rien. » Et maintenant ce mec commençait déjà à tempêter contre moi ! Je m'étais excusée il me semble. Je me suis mordue pour me retenir, vraiment, j'ai essayé de ne rien die, après tout, c'était ma faute et ce n'était pas mon caractère. Mais …« Attend mais pour qui tu te prends, pauvre tâche ? » lui ai-je rétorqué avec toute la virulence que j'avais dans mon répertoire. Certes, j'avais fait une boulette, et une grosse : agripper à ce crétin. Parce que ce n'était pas de la faute, non si ce ponton ne tenait plus. Mais la situation n'était pas totalement désespérée, le crépuscule était encore assez loin et si ce mec décidait d'utiliser ses neurones pour chercher une solution plutôt que de me balancer mes excuses au visage, on s'en sortirait surement plus vite. Elle n'était tellement pas désespérée qu'il n'avait aucune raison de me renvoyer des piques comme ça. Et si par pitié il pouvait arrêter de pousser de longs soupirs comme un moulin à vent. Je ne me suis pas relevé et je suis restée allongée dans la boue en regardant le ciel. Il ne pouvait pas se détendre deux secondes, l'autre ? Profiter de l'instant présent ? La boue avait empester, elle offrait un lit très agréable néanmoins. « Je te donne dix secondes pour me donner une bonne raison de ne pas t 'étouffer sur place » Il ne me regardait même pas pour me dire ça. Crétin. Je me suis relevé en remontant mes cheveux boueux sur ma tête, ce n'était pas grave, j'avais vu une rivière pas très loin en arrivant ici. « Oh, vraiment ? Tu me donnes dix secondes ? Trop aimable, merci » ai-je sifflé froidement. Comme si j'avais peur de lui. La bonne blague. J'en avait maté des plus féroces, et j'avais chopé la technique du maître, avec tous les voyous que remettait Cale dans le droit chemin, malgré les réticences de ses derniers, persuadés que le summum du coolissime consistait à répliquer aux adultes, boire bourré ou faire n'importe quelle connerie qui les mène aux travaux d’intérêts généraux ou petites peines de prison. Et avec le quartier où je travaillais, j'avais préféré apprendre deux trois trucs pour me défendre au cas où je me ferais attaquer. Ce n'était pas ce mec qui allait me menacer. « Bah, déjà, tu peux pas m'atteindre, donc tu vas te calmer tout de suite. »

Il fallait calmer le jeu, parce que sinon j'allais m'énerver comme d'habitude et, je me connaissais assez, je n'allais pas trouver de solution. Et je ne savais pas lui, mais je n'avais pas la moindre envie de rester patauger là dedans plus longtemps. J'aimais bien les bains de boue de mon vivant, mais la boue propre pas ce truc puant et gluant. On se croirait dans une fosse sceptique ! J'ai essayé de dégager mes jambes à la force de mes bras, rien à faire, par contre j'avais bien réussi à en foutre plus sur les manches de ma chemise. Youpi ya ! Je l'ai déboutonnée et envoyé sur ce qui restait de pont, comme ça au moins je ne la salirais pas, et en espérant que je trouve une solution avant d'être enfoncé jusqu'au cou, mon t-shirt en dessous devrait être sauf. « Tiens, au lieu de dire des conneries, tu pourrais pas m'envoyer une des planches à côté de toi, s'il te plait ? » J'ai bien insisté sur la formule de politesse. Je préférais ne pas pas ouvrir les hostilités tant qu'on était coincé là-dedans. Par contre, si le truc avec les planches marchaient, il allait avoir à faire à moi, et j'allais lui apprendre la politesse, moi ! J'avais grandis dans la maison de la politesse, et je savais me tenir comme un membre de la famille royale d'Angleterre avant d'avoir eut trois ans. Mais rien n'arrivait. Est-ce que quelqu'un d'aussi chiant existait vraiment ? J'ai claqué des doigts, s'il rêvassait, j'allais te le réveiller moi ! A coup de boue puante s'il le fallait. « Wo ! Du Schnock ? Je te parle ! Est ce que tu peux me passer une planche, contrairement à toi j'essaie de nous trouver une solution, là ! » On croyait rêver, c'était affligeant.

Il ne suffit pas de dire: Je me suis trompé; il faut dire comment on s'est trompé.

Pourquoi est-ce que cet idiot se mettait-il à rire tout d'un coup ? Il était devenu idiot ou est ce que c'était déjà là avant que je le rencontre ? Parce que dans les deux cas j'avais sérieusement de quoi m’inquiéter un peu. Je n'étais pas vraiment quelqu'un de patient de base, mais j'en avais encore moins avec les gens qui me faisaient perdre mon temps, et celui-ci était bel et bien en train de le faire. En me riant ouvertement au nez, chose que je ne supportais pas du tout. Peu de gens m'avaient ris au nez sans s'en mordre les doigts après. Sauf une personne, mais une personne investie d'un génie maléfique, et il n'était certainement pas encore arrivé au même niveau qu'Adèle. « Oh, grand ciel, la gourde du siècle va me faire quoi sinon ? Elle va me frapper avec ses petits poings de petites filles ? Inutile de te rappeler que je n'ai pas peur de toi, gamine. » j'haussais un sourcil. Mais de quoi est-ce qu'il était en train de parler cet idiot ? Peut-être que je ressemblais à une gamine, mais je ne l'avais jamais été vraiment, alors si ce monde me permettait de revivre cette partie de ma vie, je n'allais pas m'en priver, et si cet imbécile n'était pas capable de saisir ce que le Pays des Merveilles état en mesure d'offrir, et bien c'était tant pis pour lui. Je préférais ne rien rétorquer, rien sur le fait que je n'étais pas quelqu'un qui cédait à la violence, et que le frapper de mes "petits poings de petite fille" n'était vraiment pas mon style, j'étais plus prise de karatéka.

Je cogitais mon plan dans ma tête de mon propre côté, mais il fallait que je m'arrête, amusée de le voir imiter mes propres gestes, avant de me rappeler que je me devais de le haïr et de lui afficher qu'une mine austère et renfrognée pour son "la gourde" dont il m'avait si aimable gratifié. Et si ce n'était pas une preuve évidente de sa mauvaise foi, il ne me répondit même pas quand je lui parlais et tordit mes doigts dans sa main quand j'essayais d'attirer son attention en claquant des doigts. « Non. Non. T'es mignon mais tu me lâches tout de suite les doigts. » Mais au lieu de s'executer tout de suite, il préféra continuer de faire le malin « évite le Du Schnock la gourde ! » Je bouillonnais de l'intérieur, je rêvais de laisser échapper une floppée de jurons, mais je préférais me taire. Même quand il me repoussa suffisamment fort pour que je retombe fesses les premières dans la boue. Et je repoussais aussi l'idée puérile d'attraper une poignée de boue pour le lui lancer en pleine figure. Nous étions adultes, nous étions intelligents et raisonnables, on devrait peut-être s'en sortir en mettant nos force du même côté. Il souleva une planche de bois au dessus de sa tête avec un air au comble de la bêtise coincé sur son visage. Si ça ce n'était pas puérils, dites moi. « Alors c'est quoi ton plan madame ''je sais tout sur tout'' ? » J'ai soupiré profondément, j'avais envie de lui hurler qu'on était en train de s'enfoncer dans la boue, et qu'en perdant du temps, on perdait aussi des chances de nous en sortir. « Aie Aie Aie, ça va pas être simple » Je me suis calmée, autant essayer de parler entre adultes, ou du moins m'exprimer comme tel. Après, libre à lui d'agir d'une manière totalement débile du moment qu'il ne m'entraînait pas dans ses conneries. Il avait voulut m'engueuler, tant mieux pour lui, maintenant je n'avais pas la moindre envie de l'aider de mon plein gré. « Écoute Amour, au cas où tu n'aurais pas remarqué, on est en train de s'enfoncer. Et en temps normal, pour ne pas s'enfoncer, on se met à l'horizontal. Sauf que … » Je claquai dans mes mains comme lorsqu'on parlait à un enfant, pour maintenir son attention pour lui expliquer les choses. « … On s'enfonce à la verticale là, pour se sortir de là, il faut qu'on s'accroche à quelque chose le temps de remonter nos jambes à la surface, d'une certaine façon que je ne te dirais qu'une fois que j'aurais ma planche. Maintenant, prend une planche, donne m'en une et on règle nos problèmes une fois sortis » J'essayai d'être la plus diplomate possible. C'était très dur et son air de poisson rouge me donnait envie de lui donner des baffes ou de lui enfoncer la tête dans la boue jusqu'à ce qu'il s'étouffe, mais jusqu'ici je me contrôlais plutôt bien.

Je soupirai devant son manque de réaction et je me pinçais l’arrête du nez pour ne pas lui faire bouffer de la boue. « Allez Amour, ce n'est pas si dur. Plus vite on sortira plus vite on pourra régler nos affaires. Là, on perd du temps, on s'enfonce, on mettra plus de temps à sortir et on se retrouvera certainement en face de créature que je n'ai pas envie de voir. »